
Chester Thompson
un géant très discret
À 68 ans, après une carrière exceptionnelle durant laquelle il a joué avec Frank Zappa, Weather Report, Genesis, Phil Collins, Take 6, et enregistré avec des dizaines d’artistes, M. Thompson reste très actif, notamment au sein de son trio jazz. Lors de son passage à Paris, il a bien voulu évoquer sa carrière, présente et passée, son amour pour la flûte, et nous donner des nouvelles fiables de Dennis Chambers.
Pouvez-vous m’en dire plus à propos de la photo « We Four Trio » figurant sur votre site Internet ?
(Il éclate de rire) Eh bien, nous étions un groupe de quatre, notre nom était « We Four », puis nous avons viré un musicien, mais nous n’avons pas trouvé d’autre nom ! Nous faisions des instrumentaux plutôt pop, pas du tout jazz. Ça reste une époque très spéciale pour moi ; sur la photo, j’ai probablement 17 ans, et le groupe était vraiment bon. Je l’ai monté avec le guitariste O’Donel Levy, un des premiers musiciens avec qui j’ai joué à 13 ans, alors que lui en avait 16, et avec qui j’ai beaucoup enregistré et beaucoup joué, notamment avec l’organiste Jack McDuff.
Comment jugez-vous la manière dont vous jouiez à l’époque ?
Je n’ai pas d’enregistrement de cette période, mais je travaillais beaucoup, j’avais des propositions de voyage… J’ai même failli jouer avec Wilson Pickett ! Donc, je pense que je devais être un batteur plutôt correct.
Je crois avoir remarqué que vous jouez aujourd’hui avec les mains moins croisées qu’avant.
C’est vrai qu’au début, mon charleston était très bas, donc je n’avais pas le choix si je voulais pouvoir lever ma main gauche suffisamment. Mais avec le temps, je l’ai remonté, donc je croise moins, en effet. Je n’ai pas pris de cours avec un professeur sur le tard, comme le font certains, mais j’ai modifié des petites choses avec le temps. J’ai essayé pas mal de hauteurs d’assises, mais je préfère être assez haut. Parce que, si je descends trop mon siège, j’ai mal au dos. Et aussi parce que j’ai de longues jambes !
Vous venez de sortir un album en trio. Cette formation existe depuis combien de temps ?
Quatre ans. Notre premier album est sorti en 2013. Notre musique s’est mise en place assez naturellement : nous avons simplement commencé à jouer ensemble, et comme ça sonnait bien, nous avons décidé de continuer. Nous avons commencé par jammer chaque semaine, puis les premières compositions sont arrivées, les premiers arrangements. Ensuite, nous avons été engagés comme groupe résident pour un festival de trombone à Nashville, chargés d’accompagner tous les trombonistes de jazz programmés. Nous assurions trois ou quatre master-class par jour, plus un concert chaque soir. À la fin de cet engagement, nous étions vraiment devenus un groupe, donc nous avons cherché un endroit où jouer. Nous l’avons trouvé, chaque lundi pendant un an à Nashville. Bien entendu, après tous ces concerts, ça tournait vraiment bien. Juste avant de venir pour cette tournée en France, nous avons joué pour la soirée de sortie de ce second album. Nous ne nous étions pas vus depuis longtemps, et j’ai retrouvé l’énorme plaisir de jouer avec ces gars.
Sur quel kit jouez-vous avec cette formation ?
J’utilise en principe une grosse caisse de 18″, des toms de 12″ et 14″. Pour des musiques un peu plus puissantes, je passe sur une grosse caisse de 20″, avec toms de 10″, 12″, et tom basse de 15″. J’ai dû jouer une fois du jazz sur une grosse caisse de 22″, c’était quand même un peu agressif… Bien sûr, je n’utilise pas les mêmes cymbales pour la pop et le jazz. J’ai un kit de Crash pour la pop, un autre pour le jazz, avec des cymbales plus douces. Je n’aime pas les Ride qui s’enflamment, je veux toujours entendre les baguettes. J’ai participé avec Sabian à la conception d’un prototype de Liquid Ride qui n’est pas encore disponible dans le commerce, que j’utilise à chaque fois que je joue de la pop. En principe, je me déplace avec mes cymbales, mais après les événements survenus ici il y a deux semaines (l’interview s’est déroulée le 3 décembre 2015, NDR), j’ai préféré voyager léger et éviter les problèmes à la douane.
J’ai essayé la basse ! Lorsque j’étais à l’université, lorsque j’apprenais à enseigner, il fallait étudier un nouvel instrument à chaque semestre. Mais j’ai commencé par la flûte, ça m’a bien plu, et j’ai continué à en jouer à la maison.
Vous avez composé pour ce trio ?
Pas encore. Mais j’ai écrit certains arrangements du nouveau CD. La plupart de mes compositions ne sont pas jazz, en fait, c’est plutôt, disons… une sorte de World Music. Mais la musique du trio évolue constamment, nous allons sûrement nous diversifier, jouer des titres plus agressifs, donc certaines de mes compositions seront probablement adaptées. Nous sommes encore en train de chercher notre identité de groupe, nous sortons un peu du jazz swing, le son est en train de s’élaborer. Nous ajoutons des éléments, comme un saxophoniste ou un vibraphoniste. Ce dernier, Todd London, est un collègue enseignant, qui s’occupe de la classe de steel drums et enseigne aussi un peu de batterie. Un musicien très talentueux.
Justement, parlons un peu de votre activité de professeur à la Belmont University de Nashville. Combien d’heures de cours assurez-vous ?
Ce semestre, aucune ! J’ai pris un congé, et je crois que je vais le prolonger indéfiniment. Cela fait dix-sept ans que j’enseigne, j’ai écrit des tas d’exercices, suffisamment pour publier deux ou trois livres, et j’adore enseigner. Mais je crois qu’il est temps pour moi d’arrêter ; j’ai vraiment envie de développer ma musique et mon jeu, et enseigner me contraint à limiter le nombre de mes projets musicaux. Je n’étais présent que deux jours par semaine à l’école, mais il faut du temps de préparation, ça demande de l’énergie, qui ne va pas dans la composition… J’y retournerai peut-être, on ne sait jamais. Mais je continue à donner des leçons privées dans un magasin de musique.
Vous avez donc commencé dans cette université en 1998, alors que vous étiez en pleine activité avec Genesis et Phil Collins. Comment avez-vous pu allier ces tournées mondiales avec les cours ?
En fait, je n’ai dû prendre que trois fois des semestres de congé ; une année complète pour la tournée de Genesis de 2007, et deux semestres sur deux années différentes pour Phil, en 2004 et 2005, je crois. Je me suis alors fait remplacer par deux autres professeurs de l’université : Zoro et Derico Watson, qui joue avec Victor Wooten. Beaucoup d’étudiants veulent apprendre avec moi, de plus en plus, mais j’ai vraiment envie, aujourd’hui, d’avoir du temps pour moi. Je vis enfin dans un endroit où il me suffit de descendre les escaliers pour pouvoir jouer de la batterie. Je joue aussi un peu de flûte, et j’aimerais pouvoir atteindre un niveau où je n’aurai pas honte de ce que j’enregistrerai.
C’est rare, un batteur qui joue de la flûte ! En général, nous nous mettons plutôt à la guitare ou la basse !
J’ai essayé la basse ! Lorsque j’étais à l’université, lorsque j’apprenais à enseigner, il fallait étudier un nouvel instrument à chaque semestre. Mais j’ai commencé par la flûte, ça m’a bien plu, et j’ai continué à en jouer à la maison. Après, étant tout le temps sur la route, je n’ai plus eu le temps ni la possibilité de la travailler : trop de fatigue, pas vraiment de moyens de s’isoler… Il y a quatre ans, j’ai décidé de reprendre des cours avec un professeur, sur le répertoire classique. Je ne suis pas encore prêt à improviser, c’est beaucoup plus facile de lire une partition ! Mais ça m’a donné encore plus de compassion pour mes étudiants. Je comprends vraiment par quels tourments ils passent, sur un instrument qu’ils ne maîtrisent pas ! (Rires)
Donc vous savez lire la musique.
Oui, bien sûr, j’ai appris avant d’apprendre la batterie, et c’est très important pour moi.
Beaucoup de batteurs de votre génération ne savent pas lire, à commencer par Phil Collins… Ça vous a beaucoup servi ?
Bien sûr, ne serait-ce que pour enseigner ! Une partie de mon boulot, c’est d’apprendre à lire à mes élèves. Sinon, avec Zappa, tout était écrit. Aujourd’hui, j’ai beaucoup perdu, mais à l’époque, je lisais à vue, et avec Zappa, c’était tous les jours, et ce n’était pas simple.

La prochaine étape, pour votre carrière de flûtiste, c’est d’en jouer au sein du trio ?
Je l’ai déjà fait ! Lors d’une énorme fête d’anniversaire, il y a plusieurs années, à Nashville. C’était en décembre, j’ai joué des thèmes de Noël, il y avait plein de musiciens, nous avons fait le bœuf toute la nuit… Tout le monde m’a conseillé de jouer sur l’album, mais je n’étais pas prêt. Je crois que j’ai un bon son, mais je ne suis pas véloce, mes doigts sont encore raides. Je suis peut-être trop exigeant avec moi-même, mais c’est difficile, quand on joue sur un instrument sur lequel on est à l’aise, de passer ensuite sur un autre où on ne l’est pas.… Mais je travaille dur.
J’ai lu quelque part que vous avez travaillé avec l’ensemble vocal Take 6. Comment cela s’est-il passé ?
Ils ont enregistré en 1994 un album avec une section rythmique auquel je n’ai pas participé, intitulé “Join the Band”. Quand ils sont partis en tournée, j’ai été engagé par leur manager comme batteur et directeur artistique. C’était une expérience incroyable, vraiment, car ce sont des chanteurs fabuleux. J’ai choisi des musiciens que je connaissais, en qui j’avais confiance pour la basse, les claviers, la guitare. Je dirigeais les répétitions, j’écoutais les enregistrements de tous les concerts, et lorsque j’ai entendu qu’un des chanteurs, un soir, était légèrement faux, j’ai dit aux gars : « Nous jouons trop fort. Ce gars ne peut pas chanter faux, s’il ne s’entend pas ! ». Je ne crois pas que cette tournée ait été enregistrée. En 1995 ou 1996, on ne filmait pas les concerts pour les publier sur Internet !
Pourquoi avez-vous arrêté de travailler avec eux ?
J’avais un boulot à terminer à Nashville, qui me prenait beaucoup de temps. J’ai dû choisir !
J’ai rencontré Phil Collins il y a six mois, et il m’a raconté qu’il vous avait contacté pour le remplacer à la batterie dans Genesis parce qu’il voulait apprendre le fameux fill qu’il adorait et que vous aviez joué avec Zappa.
Oui, c’est vrai, il a voulu que je lui apprenne dès la première répétition !
Donc, vous avez appris quelque chose à Phil Collins. Avez-vous appris quelque chose de lui ?
J’ai surtout appris sur la manière d’accompagner une chanson. Il n’a pas son pareil pour trouver une partie de batterie qui met un titre en valeur. Jusque là, moi, j’étais plutôt sur : charleston sur le couplet, cymbale sur le refrain. Mais lui ne pense pas du tout comme ça. Il entend l’ensemble de l’arrangement et compose sa partie de batterie en fonction. C’est assez unique.
J’aimerais qu’on parle aussi de vos fameux duos de batterie. Comment les composiez-vous ?
Lors des premières tournées en 1977-78, c’était surtout moi qui donnais les idées. Car même quand il jouait du jazz-fusion avec Brand X, Phil ne prenait que rarement des solos. Au fur et à mesure, il a commencé à avoir de plus en plus d’idées, et nous avons fini par composer à deux, sur des tabourets.
Le duo sur tabourets remonte donc à bien plus longtemps que 2007 ?
Oui, bien sûr, nous avons toujours travaillé comme ça. Nous nous installions à l’hôtel, attrapions deux chaises ou deux tabourets, et nous improvisions. Phil gardait ça en mémoire grâce à un enregistreur, nous réécoutions et gardions les passages les plus intéressants. En 2007, pour préparer la tournée, il est arrivé avec plusieurs enregistrements des tournées précédentes, nous avons choisi les meilleures parties et les avons assemblées, toujours sur des tabourets. Phil enregistrait cette fois avec le micro intégré de son ordinateur portable. Quand nous avons réécouté ce que nous avions joué, nous avons trouvé que le son était vraiment bon, et que nous allions enfin pouvoir faire ce truc des tabourets sur scène. Ça faisait longtemps que nous en avions envie. Mais volontairement, je ne me mettais pas trop en avant pendant ce duo, parce que c’était Phil que les gens venaient voir, pas moi. J’étais là pour assurer une assise, même si, à certains moments, il y avait des échanges.
Vous commenciez les concerts de la tournée de Phil Collins de 2004 par un trio de percussions, avec Luis Conte. Comment avait-il été construit ?
Nous l’avons établi à trois, vraiment, chacun a pu apporter ses idées. Les parties véritablement solo étaient libres, chacun son tour, puis nous attaquions trois grooves différents, il me semble, avec pas mal de liberté à l’intérieur. Nous avions des points de repères rythmiques, qui nous permettaient de passer d’une partie à l’autre.
Vous expliquiez dans une interview trouvée sur Internet que vos premiers batteurs favoris étaient Max Roach, Art Blakey, Tony Williams…
Et Elvin Jones ! C’est probablement le premier batteur que j’ai essayé d’imiter. Pas pour jouer comme lui, mais pour comprendre sa gestion du temps. Quoi qu’il jouait, elle était incroyable : il était parfois complètement en dehors, puis il revenait dedans… Je travaillais avec un métronome, j’essayais de jouer avec, puis de m’en éloigner sans le perdre pour pouvoir revenir.
Et aujourd’hui, quels batteurs vous inspirent ?
Aujourd’hui, je n’écoute personne pour essayer de rejouer quoi que ce soit. J’ai déjà suffisamment de choses à travailler, d’idées que j’entends mais que je n’arrive pas encore à jouer. Mais j’en apprécie beaucoup : Robert Sput Searight, Keith Carlock… On ne peut qu’aimer Steve Gadd… Billy Cobham reste un de mes héros, Dennis Chambers est un vrai ami, et j’adore le regarder jouer.
Vous avez de ses nouvelles ? La dernière vidéo que j’ai vue de lui faisait vraiment peur (je rappelle que nous étions début décembre, NDR).
Non, il va très bien. Tout le monde a cru qu’il était malade, mais il a fait beaucoup d’efforts pendant deux ans pour perdre du poids, car son médecin lui a dit qu’il risquait de gros problèmes. Du coup, les gens qui ne l’avaient pas vu depuis deux ans se sont demandé ce qu’il avait, ont commencé à parler. Et puis, il y a eu ce type qui a posté sur Internet une photo de Dennis en train de manger. Son visage avait une position bizarre, et le gars a mis un commentaire du genre : « Dennis ne va pas bien. » Ça a rendu Dennis fou de rage, évidemment, ainsi que les gens de Pearl. Mais la rumeur s’est répandue, et tout le monde a cru que Dennis était mourant. Il faut avouer qu’il a eu de graves problèmes de reflux acides, il y a quelques années, qui ont creusé un trou dans son estomac. Il a été opéré pour cela, mais il restait un endroit affaibli que les médecins n’ont pas décelé, et ça s’est ouvert alors qu’il était en tournée en Espagne. Il s’est évanoui dans sa chambre d’hôtel, en saignant beaucoup. Il s’est réveillé à l’hôpital sans se souvenir de ce qu’il lui était arrivé. Il a dû arrêter de jouer pendant quatre mois. Mais aujourd’hui, tout va bien. Il joue toujours aussi incroyablement qu’avant.
Vous avez appris des trucs en le regardant jouer ?
Eh bien, en fait, nous sommes tous les deux de grands fans de Billy Cobham ! Tous les deux, nous l’avions copié, à notre manière. J’adore le regarder jouer, je respecte ce qu’il fait, mais je ne veux aucunement le copier.
Vous parliez de Steve Gadd, tout à l’heure. Vous vous souvenez de vos impressions, à l’époque, en le voyant débarquer dans le monde de la batterie avec ce son si particulier ?
Non, pas vraiment. J’ai passé l’année 1975 en tournée avec Weather Report ; ensuite, j’ai travaillé en studio à Los Angeles tous les jours, le plus souvent pour de la fusion ou du Rhythm’ & Blues, et j’avais donc constamment de la musique à apprendre. Dans ces cas-là, je n’écoute aucune autre musique. Ce n’est que plus tard que j’ai découvert Steve et, bien entendu, je n’en croyais pas mes oreilles.
On ne vous a jamais demandé d’avoir le même son ?
Non, jamais. Si j’avais fait de la pop, on me l’aurait probablement demandé. Mais dans les styles que je jouais, jazz, jazz-fusion, musique latine, il n’en était pas question. Je jouais avec Freddie Hubbard à cette époque, avec Chick Corea aussi, c’était vraiment super… J’ai fait beaucoup de jazz, en fait, mais peu de gens le savent !
Forcément, on vous a surtout vu dans des stades avec Genesis !
Et c’est ce qui complique un peu la vie de mon trio actuel, car les tourneurs me voient comme un batteur de rock ! Mais peut-être qu’avec ce deuxième CD, ils vont comprendre que le jazz fait aussi partie de moi.
J’ai remarqué que vous jouez avec vos baguettes Regal Tip signature, qui sont assez longues. De quel modèle s’agit-il ?
Ce sont des 1A, le modèle que je joue depuis toujours, celui qu’utilisait mon premier professeur. Quand j’avais 13 ans, il m’a dit qu’il les avait adoptées parce qu’on peut jouer plus vite avec ! Forcément, il me fallait les mêmes ! Plus sérieusement, comme je joue beaucoup avec les doigts, j’ai besoin d’une bonne longueur de baguette à l’arrière pour faire balancier, et celles-ci mesurent 17 pouces (43 cm environ, NDR). C’est Joe Porcaro fils qui m’a contacté pour créer un modèle Regal Tip à mon nom. Ça m’a intéressé, parce que j’avais vraiment du mal à trouver des 1A sur la route, et du coup, je prenais des Regal Tip Jazz, notamment le modèle JC. J’ai expliqué à Joe mon problème pour trouver des 1A, et il m’a répondu : « Mais nous en fabriquons ! ». Je les ai essayées, mais elles n’étaient pas équilibrées comme j’aime, le col était trop fin, je les aurai cassées trop rapidement. Il a écouté mes suggestions et a apporté les modifications que je demandais. J’ai longtemps joué avec des baguettes en hickory, et ce sont celles que je prends quand il faut frapper fort, mais j’ai découvert les baguettes en érable chez un ami, et j’ai adoré : la sensation est vraiment différente, la note est plus haute sur les fûts et les cymbales. Donc j’ai des baguettes véritablement « signature », et en érable. J’en ai même d’autres, non commercialisées, de même dimension, mais de plus faible diamètre, pour le jazz. Tous ceux qui les ont essayées les aiment, donc elles vont peut-être sortir un jour.
Vous avez joué sur de très nombreux kits au cours de votre carrière, souvent assez massifs. Vous les avez toujours ?
J’en ai gardé un certain nombre, oui, mais je n’ai pas assez de place chez moi, donc je paye un local pour les stocker ! Malheureusement, ce local a subi une inondation en 2010, et de nombreux kits ont pris l’eau, notamment celui de la dernière tournée de Genesis. Il a plutôt bien séché, mais il a fallu que je retire tout l’accastillage de tous les fûts pour le nettoyer, avec mon technicien batterie. Le placage or en a pris un coup. Ce que je ne savais pas, c’est que sur celui-ci, ils ajoutent une fine couche de plastique pour que l’or reste bien brillant, et cette couche a été complètement détruite par l’eau et les produits chimiques qu’elle contenait.
Vous avez gardé tous les kits des années 1970, également ?
Non, pas ceux-ci. J’en ai donné, j’en ai vendu, notamment à mes meilleurs étudiants, à des prix imbattables. Ils les jouent toujours, ils sonnent toujours super bien. Mais je ne pouvais de toute façon plus jouer en public des kits d’une autre marque que celle qui me sponsorise. En studio, on fait ce qu’on veut, en fonction du son qu’on recherche pour tel ou tel projet, donc parfois, j’utilise un kit du passé. Mais je dois reconnaître que pour 95 % des projets, ma DW est parfaitement adaptée. Et puis, je ne suis pas un collectionneur. Si je ne peux pas jouer un kit, aucun intérêt pour moi.
Quel est le kit sur lequel vous aimeriez rejouer ?
Mon vieux kit Slingerland 55 ! Ce que je reproche aux nouveaux kits, c’est que si vous jouez en rim shot, les tirants se desserrent. Sur ces vieux kits, ça n’arrivait jamais. Ce kit Slingerland, je l’ai donné à un ami qui s’était fait voler sa batterie. Je l’ai revu plus tard en Floride, sur un nouveau kit. Je me suis dit que j’allais enfin pouvoir récupérer ma Slingerland. Mais il l’a donnée à un gamin très doué qui voulait jouer et dont la famille était vraiment pauvre… Mais sinon, je trouve vraiment tout ce que je veux chez DW. À chaque tournée, je bénéficie d’un son étonnant. Ils s’adaptent à chaque fois à mes demandes, notamment pour des fûts assez épais. Ils me fournissent les couleurs et les finitions que je veux, m’en suggèrent parfois certaines. J’ai toujours décidé de la couleur de mes batteries, sauf une fois, quand Phil m’a demandé un kit au look vintage pour sa tournée Motown. Je comprenais parfaitement sa demande, je jouais déjà à l’époque Motown, sur de telles batteries. DW m’a à cette occasion fourni un kit en finition Silver Sparkle, avec grosse caisse de 24″, sonorisée par un micro placé devant la peau de timbre fermée. Les toms étaient de 12″ et 16″ sur scène, mais j’ai aussi eu des toms de 13″ et 18″, et quand je monte l’ensemble, j’ai un son énorme ! Je peux jouer du rock avec ça ! •