REMO BELLI

Remo Belli, 1927 – 2016

PORTRAIT NOIR

Une vraie Remolution !

Remo D. Belli, batteur et créateur de la peau Remo demeure étroitement lié à l’essor du rock n’ roll ! A 88 ans, son investissement et ses actions autour des bienfaits de la percussion ont fait de lui une icone du monde de la musique. Remo s’est éteint le 25 avril dernier à Pasadena en Californie, quelques mois après cette interview réalisée à Paris. Son prénom, en logo sur des dizaines de milliers de peaux de grosse caisse de toutes marques, demeure la plus belle des épitaphes…

Remo, avant d’être celui qui a développé la peau plastique, vous étiez batteur et vous aviez un magasin de batterie !
Oui, j’ai ouvert le Drum City à Hollywood, en 1952 (rires), et c’est là que tout a commencé. J’étais avant tout un batteur professionnel en Californie, ce qui correspond à un travail en studio et à pas mal de déplacements à Las Vegas, New York, Miami etc… Principalement dans le jazz, au sein de big bands et de plus petites formations. Comme je faisais partie des bons batteurs pour les shows de l’époque Swing, j’ai notamment travaillé avec Anita O’Day, Billy May, Jimmy Giuffre, Shorty Rogers, et du moment que le salaire était bon, je faisais le boulot (rires). Avec un autre batteur californien, Roy Harte, j’ai donc créé ce magasin et commencé à réaliser que je n’étais pas mauvais dans le domaine du business, car très vite, nous avons rencontré beaucoup de succès.

Quelle marque de batterie jouiez-vous à cette époque ?
Une Gretsch ! Mes clients étaient tous des drummers fantastiques, comme Shelly Manne qui était un ami très proche, Louie Bellson, Franck Butler, Chico Hamilton et bien d’autres… Le magasin était la Mecque de la batterie à Hollywood.

Remo D. Belli, jeune batteur actif durant l’ère du Swing
Remo D. Belli, jeune batteur actif durant l’ère du Swing

C’est Evans qui a introduit le processus de la peau plastique, mais comment cette histoire a-t-elle vraiment commencée ?
Tout a commencé avec Dupont Mylar® ! Lorsque cette société a développé le Mylar®, ils sont allés voir Slingerland et Ludwig, en présentant ce nouveau produit, avec la possibilité d’adapter cette matière innovante pour les peaux de batterie. En tant que batteur et propriétaire d’un magasin, lors d’un concert à Chicago, je suis passé saluer les gens de Slingerland et c’est eux qui m’ont montré ce bout de Mylar® dont ils ne savaient pas vraiment quoi faire. On parle de 1955, l’époque des peaux animales, et je n’ai pas tout de suite réagi, jusqu’à la foire annuelle de la côte Ouest, que nous organisions au magasin, car le NAMM n’exposait qu’à Chicago, en juin. Nous avions reçu des échantillons de la part des marques, dont une première peau en Mylar® faite par Evans dans le Minnesota. Elle n’était pas très au point et personne ne l’utilisait encore, car avec les clous et la forme globale de la peau, on ne pouvait pas vraiment la tendre comme il fallait. Je me suis donc procuré du Mylar® et je l’ai monté avec des agrafes sur le même type de cercle que l’on utilisait pour les peaux animales. Assez vite, mon comptable de l’époque m’a présenté un chimiste du nom de Sam Muchnick, et avec les indications que je lui donnais, il a trouvé le moyen d’assembler le Mylar® à un cercle en aluminium, avec une colle adaptée.

Je désire donc désormais proposer nos peaux, fûts et percussions en tant que produits destinés à rendre la vie meilleure

Vous avez tout de suite proposé ce prototype aux batteurs ?
Je connaissais tous les batteurs des Etats-Unis, alors au départ, le marketing ne m’a pas coûté cher ! (rires). Max Roach et tous les batteurs de l’époque ont testé cette peau et avec leur avis, mon aptitude de batteur m’a aidé à distinguer la meilleure catégorie de Mylar® destinée à cette utilisation spécifique, sans aucune distinction d’épaisseur au départ. Ce n’est que par la suite que sont nées l’Ambassador, la Diplomat ou l’Emperor, mais nous expérimentions déjà des combinaisons de plusieurs épaisseurs. En 1952, à l’écoute des demandes de Max Roach ou Dave Tough, nous avons été les premiers à fabriquer des plus petites peaux pour les grosses caisses. Un peu plus tard, Hal Blaine, qui enregistrait jusqu’à cinq séances par jour, avait l’idée d’un type de son qu’il recherchait, et on a essayé jusqu’à ce que l’on trouve. Pour l’ancêtre de l’Ambassador, nous utilisions deux couches de Mylar®, et pour l’Emperor, trois couches. Nous faisions également des essais avec du papier de verre, et comme il était difficile de fixer des produits sur cette matière, nous avons mis au point le spray pour la surface blanche sablée, qui donne cette texture grainée si utile pour les balais. A ce moment-là, nous étions les seuls à être arrivés à un résultat aussi abouti, avec le même système que nous utilisons aujourd’hui, et que tout le monde utilise d’ailleurs depuis que le brevet (17 ans aux Etats-Unis) est passé dans le domaine public.

La Pinstripe est née de la même façon ?
En parlant aux batteurs, oui, bien entendu ! Steve Gadd, en l’occurrence. J’étais toujours intéressé par leurs désirs et leurs remarques, du style Motown au rock n’ roll, et quelque part, ça a pas mal changé les choses. Nous n’avons fait qu’utiliser ce produit, mais si Dupont n’avait pas développé le Mylar®, le rock n’ roll ou du moins la batterie rock n’aurait pas existé. Pas uniquement parce que les batteurs tapaient trop fort, mais parce qu’il n’y avait pas assez de peaux animales pour fournir la demande ! Il n’y avait à l’époque qu’une ou deux entreprises qui fournissaient des peaux animales, et de leur côté, en 1964, Slingerland et Ludwig pouvaient à peine répondre à la demande qui suivit le passage des Beatles au Ed Sullivan Show. Dans le début des années 1960, rien qu’au Japon, il y avait 23 fabricants de batteries, qui produisaient 30 000 kits de cinq fûts par mois !… Où aurait-on trouvé les peaux ? Au départ, le Japon envoyait les batteries sans peaux aux Etats-Unis et ensuite, nous avons commencé à envoyer des containers de peaux là-bas.

Aujourd’hui, les fabricants continuent en grande partie à faire confiance à Remo !
Oui, 90% des batteries actuelles sont équipées de nos peaux, sachant qu’une grande partie de notre production est fabriquée en Chine ou à Taïwan, mais la gamme made in USA est bien entendu fabriquée sur le sol américain. Cette connaissance historique du produit et notre collaboration de 58 années avec Dupont nous permet de commander le bon Mylar®, qu’il s’agisse de peaux pour les timbales d’orchestre, pour les percussions ou pour les batteries. Le matériau est heureusement assez économique, même s’il augmente avec le cours du pétrole !

Qu’en est-il des cymbales ? Vous n’avez jamais songé à en fabriquer ?
Oh, j’ai vendu des milliers de cymbales Zildjian à Drum City et je connais très bien la famille ! J’ai vécu la séparation entre les deux frères et vu l’évolution d’une cymbale Ride dont nous dépendions, avec ce ding dingading (il mime le geste en le disant, ndlr), et aujourd’hui encore nous évoquons avec les filles Zildjian ce qu’était une cymbale il y a 50 ans et ce dont les batteurs ont besoin actuellement. D’ailleurs, Zildjian “pêche” aussi dans le passé pour ses nouveaux produits (rires). De même, cela me réchauffe le cœur de voir le kit 4 fûts revenir en force, car c’est tout ce que j’ai jamais joué… Dieu sait que c’est assez difficile avec quatre fûts !

On est actuellement dans un retour vers le vintage et certains de vos concurrents mettent pas mal d’énergie à développer des produits qui répondent à cette mode. Qu’en pensez-vous ?
En ce qui nous concerne, la mode revient pas mal aux peaux CS avec les ronds noirs qu’utilisaient Tony Williams ou Billy Cobham. Le son était très spécial et c’était beau sur un plan esthétique ! Les Pinstripe, que j’avais également voulu transparentes, ont elles aussi été très longtemps à la mode. Nous avons développé les Fiberskin pour les batteurs qui apprécient le son vintage et souhaitent approcher des peaux animales, mais nous avons énormément de succès avec ces peaux pour nos percussions du monde et j’en suis très fier. Je suis également fier de nos équipes, qui ont su développer le bon produit, la bonne épaisseur, la technique pour que toutes ces peaux épousent la forme des percussions, avec le bon profil, la taille, la dimension… Nous sommes la seule société au monde à pouvoir fournir à peu près toutes les peaux possibles et imaginables, y compris pour des tambours japonais, coréens ou chinois !

C’est cela que vous appelez la “Remolution” ?
Ça n’aura pris que 58 ans, mais elle est bien là ! (rires) Aujourd’hui, c’est tellement pratique de jouer des peaux consistantes, solides, que même les fans de peaux animales se rendent compte que la différence de son ne vaut pas la peine, d’autant que deux peaux animales ne seront jamais identiques. L’innovation est d’ailleurs sans fin, et depuis le dixieland, le swing, le be bop, le rhythm n’blues, le rock et la pop, nous avons connu une évolution qui ne s’arrête jamais. Après 25 ans de recherches, je suis heureux d’annoncer que la musique en général et que le rythme en particulier sont bien plus importants pour l’être humain que ce qu’il considère. En vérité, Batteur Mag devrait en fait s’adresser à un public beaucoup, beaucoup plus large ! Les programmes que j’ai développés le prouvent et ils n’ont pas été mis en place dans un but de marketing, car c’est la science qui est venue à nous. En considérant le cadre de la musicothérapie, un aspect de la musique de plus en plus pris en considération par les spécialistes, cela ne m’a pas été difficile de me poser la question : « Que pourrais-je faire dans ce domaine-là ? Comment puis-je amener mon industrie vers le futur ? ». Il faut savoir qu’aux Etats-Unis, seulement 8% de notre population joue d’un instrument ! En France, il n’y en a peut-être que 4%… Mais il existe une différence fondamentale entre « jouer » d’un instrument et « utiliser » un instrument, or il ne faut pas dire : « Si tu ne sais pas jouer, ne joue pas ! ». Selon nos estimations, 25% des gens devraient se montrer intéressés. Comme pour le tennis, ce n’est pas parce que tu prends plaisir à taper dans une balle que tu vises absolument Wimbledon ! Je ne sais pas construire des cours de tennis, mais mon cours de tennis à moi, c’est mon Recreationnal Center (voir photo) ! Grâce à la science, nous sommes arrivés à un résultat qui prouve que mes clients devraient potentiellement être tous les êtres humains vivant sur cette planète, de 2 à 90 ans, et même pour les bébés prématurés ! Il ne s’agit donc pas uniquement de divertir les gens avec de la musique, car je crois fermement au fait que l’utilisation d’un tambour ou d’une percussion peut désormais être utilisé comme un outil destiné à rendre la vie de chacun meilleure. Le rock et la pop ne s’arrêteront jamais, mais toi et moi ne pouvons pas créer la prochaine « pop », en revanche nous devons contribuer à voir plus loin et à imaginer le futur. Il faudrait que tu puisses venir voir nos centres musicaux récréatifs, au nord d’Hollywood, où les gens viennent et utilisent des instruments à percussion, sans forcément savoir jouer !

Remo Belli et Philippe Lalite devant devant le Recreational Music Center au nord d’Hollywood
Remo Belli et Philippe Lalite devant devant le Recreational Music Center au nord d’Hollywood

Certaines entreprises privées ont compris cela et proposent des « Team Buildings » à leurs équipes, en les faisant encadrer par un pro qui leur fait découvrir le rythme et la percussion, dans un travail à la fois récréatif et constructif pour le lien d’une équipe !
Tout à fait, et en ce qui nous concerne, nous travaillons dans quatre domaines. Les centres récréatifs, les écoles, mais également auprès des populations à risques, dans le cadre du comportement au sein de l’école, avec toute la mixité de langage, de culture et d’habitude que l’immigration a apportée au fil des années. Nous avons actuellement équipé 25 000 écoles, ce qui reste assez peu si tu considères qu’il y en a 150 000 auxquelles nous pouvons nous adresser avec notre programme « World Music Drumming » ou avec notre « Behavior Modification Program », qui vise à rapidement transformer une école réputée « dangereuse », où les profs ne peuvent enseigner, en zone sûre… et crois-moi, ça marche ! Ce sont les scientifiques qui nous ont aidés à obtenir ce résultat et ce sont des gens de chez Remo qui interviennent.

Quels sont les autres domaines ?
Celui que nous avons baptisé « Comfort Sound Technology », un son qui peut être utilisé professionnellement pour soigner ou aider les autistes, les Alzheimer, les hémophiles et même certains handicapés. Ils peuvent utiliser ces percussions et cela leur fait beaucoup de bien, car les Drum Tables ou autres « Drums Kits » de cette gamme produisent des sons centrés et contrôlés, avec une grande et belle vibration grave et pas de fréquences aiguës. Il s’agit d’instruments très accessibles, pour des thérapies individuelles ou en groupe.

Comment voyez-vous l’avenir ?
Toi et moi savons que le business de la musique est une machine complexe, et que vivre en tant que batteur professionnel est de plus en plus difficile, même pour quelqu’un comme Vinnie Colaiuta. Sur le plan du matériel, les gens disent que le ukulélé a un bel avenir, pourquoi pas ? Le cajon aussi, un instrument formidable car il est petit, léger, tu peux t’asseoir dessus, en jouer à la maison et le son qu’il produit est pas si mal (rires). Les pads électroniques ont eux aussi de l’avenir, surtout depuis la peau maillée, plus agréable à jouer. J’ai participé au développement de ces peaux et même des fûts Roland, fabriqués à partir d’Acousticon®, comme les kits Remo ! La batterie, les cymbales, les peaux et tout ce qu’il y a autour servent pour la musique, quel que soit le style, et une chose est certaine, quel que soit la partie où nous évoluons dans le Music Business, nous n’avons jamais tué personne ! Bien au contraire, je pense que nous faisons du bien aux gens ! Environ 75% des gens achètent des batteries électroniques pour pouvoir jouer en appartement et on revient à l’esprit du cajon, car le public de masse veut avant tout se faire plaisir. C’est une chose que nous devons comprendre et intégrer. L’utilisation du tambour sera à mon sens plus importante que jamais dans l’histoire et rien ne va arrêter cette expansion, exactement comme le tennis. Je désire donc désormais proposer nos peaux, fûts et percussions en tant que produits destinés à rendre la vie meilleure. Certains les utiliseront sans doute pour soigner, mais dans tous les cas et tant pis si je me répète, « utiliser » la percussion, à l’inverse de « jouer » d’un instrument à percussion, avec des produits et une approche destinés au public de masse où celui qui voudra continuer à « jouer » pourra bien entendu le faire, reste pour moi le plus important. Je pense réellement que tout doit se résumer à ça. •

Remo Belli et Philippe Lalite entourés d’Octave (gauche) et Thierry Lalite (droite), posant devant le stand Remo lors d’un Namm Show à Los Angeles.
Remo Belli et Philippe Lalite entourés d’Octave (gauche) et Thierry Lalite (droite), posant devant le stand Remo lors d’un Namm Show à Los Angeles.

Hommage d’un ami
Petit garçon, je dessinais (pendant les cours de maths…) le logo Remo ! Mon rêve le plus fou était de partir aux USA et travailler dans son usine. Il était tout ce que je rêvais d’être, mon mentor en fait ! Lorsque j’ai eu l’occasion de le rencontrer, au tout début de la Baguetterie (début 80), c’était comme serrer la main à un Dieu vivant. Les années ont passé et nous sommes devenus amis. Je rencontrais Remo systématiquement dans les salons comme le Namm Show, où nous prenions le temps de bavarder avec mon anglais et son français tous les deux succincts. J’ai eu la chance de visiter plusieurs fois (presque à chaque voyage aux US) sa magnifique usine de Valencia, au nord de L.A. Mes enfants ou mes collaborateurs me suivaient, et à chaque fois, c’était Remo en personne qui nous faisait visiter chaque recoin de l’usine. Il me montrait aussi son “labo”, qui lui était entièrement consacré, où il développait ses idées d’instruments ou de peaux révolutionnaires, en passant par les premiers djembés en Acousticon ou ses tambours NSL (Not So Loud), dont il était convaincu du succès. C’était un vrai visionnaire passionné et sans cesse en ébullition, jusqu’à ses derniers jours.
Quand il venait en Europe, il passait obligatoirement à la Baguetterie Paris un ou deux jours et restait avec moi à discuter dans mon bureau, où nous passions des moments inoubliables. Remo adorait marcher, il me traînait dans Paris, sachant que la marche n’est pas mon truc, mais avec lui tout devenait plaisir. Nous allions souvent dans des restos de fruits de mer qu’il adorait, et principalement Ami, sa charmante épouse. Sa disparition brutale, inattendue malgré ses 88 ans, qu’il portait fièrement et avec une santé physique comme morale hors du commun, a été un choc pour moi et toute l’équipe de la Baguetterie. Le monde de la batterie perd son plus bel “Ambassador” et je perds un ami qui va terriblement me manquer. Je suis triste… Mes plus intimes et profondes condoléances vont à son épouse et ses enfants, qui doivent le pleurer, et à tous ses collaborateurs.
RIP mon Ami.
Philippe Lalite


ABC des marques – septembre 2012 / Batteur Magazine numéro 261 par Christophe Rossi


REMO

Remo Belli ne prétend pas avoir inventé la peau de batterie en matière plastique, il admet seulement avoir réussi à l’imposer sur le marché.
Remo, une success story née avec le rock’n’roll.

En janvier 2007, Remo Belli (à droite) avait organisé une superbe réception lors du Winter Namm Show pour célébrer les 50 ans de la marque. L’occasion de recevoir de nombreux présents de la part des plus grand fabricants, dont cet Award offert par Debbie Zildjian et John DeChristopher (cymbales Zildjian).
En janvier 2007, Remo Belli (à droite) avait organisé une superbe réception lors du Winter Namm Show pour célébrer les 50 ans de la marque. L’occasion de recevoir de nombreux présents de la part des plus grand fabricants, dont cet Award offert par Debbie Zildjian et John DeChristopher (cymbales Zildjian).
Les batteries Remo se singularisent par des fûts en matériau composite, l'Acousticon, insensible aux variations de température et d'hygrométrie. Ces instruments ont séduit des batteurs comme Mokhtar Samba, Ricky Lawson et Jeff Hamilton.
Les batteries Remo se singularisent par des fûts en matériau composite, l’Acousticon, insensible aux variations de température et d’hygrométrie. Ces instruments ont séduit des batteurs comme Mokhtar Samba, Ricky Lawson et Jeff Hamilton.
La peau Weather King, ici dans sa version "Ambassador", quelques grammes de plastique sur lesquels s'est bâti l'empire Remo.
La peau Weather King, ici dans sa version “Ambassador”, quelques grammes de plastique sur lesquels s’est bâti l’empire Remo.

Jusqu’en 1957, les batteurs frappent exclusivement sur des peaux animales. Certes, Marion « Chick » Evans expérimente durant ces années-là une nouvelle peau de batterie avec un film polyester fixé sur un cerclage en bois. Un produit qui sera amélioré et commercialisé dès 1957 sous la marque Evans par Bob Beal. Remo Belli, batteur et directeur du magasin Drum City à Hollywood, se penche sur le problème et, avec l’aide d’un chimiste, Sam Munchnik, propose une alternative en collant un film de Mylar (produit fabriqué par la firme Dupon) avec une résine Epoxy dans un jonc en aluminium au profil en U. Nous sommes en avril 1957, et la fameuse peau Weatherking (que l’on peut traduire littéralement par « Roi des intempéries ») vient de naître, tout comme la nouvelle société Remo, Inc..
Au début de la commercialisation de la Weatherking, la réponse est mitigée, mais Remo Belli connaît tous les grands fabricants de batterie et ne tarde pas à les convaincre d’équiper leurs instruments avec cette peau révolutionnaire. Ses clients de Drum City, tels Louie Bellson et Buddy Rich, essaient les Weatherking et sont conquis. La notoriété du produit se développe à une époque où la pratique musicale est en plein essor, avec le jazz et le rock’n’roll, et bientôt la pop music aiguillonnée aux USA par la British Invasion. Remo devient en deux décennies la référence absolue de la peau de batterie synthétique, avec notamment la commercialisation de la double peau PinStripe en 1972.

La batterie dans la peau
En 1983, Remo Belli, qui a déjà commercialisé les Roto-toms, décide de se lancer dans la fabrication de batteries. Un kit d’étude pour commencer, les modèles PTS aux peaux pré-accordées, et deux années plus tard une gamme complète de batteries professionnelles. Là encore, Remo parie sur l’innovation, en choisissant pour la confection des fûts un matériau composite en fibre de bois et en résine, dénommé Acousticon. Le but est de produire un instrument, qui, à l’instar des peaux synthétiques, ne souffre pas des variations de température et d’humidité.
Remo diversifie ensuite sa production avec des instruments de percussions les plus divers, comme de traditionnels congas, bongos, djembés, tambourins et autres  tambours sur cadres, toujours en utilisant l’Acousticon pour les fûts, qui sont évidemment équipés de peaux synthétiques. Parallèlement, la production de peaux ne faiblit pas et la marque diversifie ses modèles afin de suivre au plus près l’évolution des divers courants musicaux. Qu’il soit adepte du rock le plus dur ou de musique plus acoustique, chaque batteur peut trouver son bonheur dans le vaste catalogue de peaux Remo.
Enfin, le patron de cette marque devenue incontournable s’est beaucoup investi dans l’intrumentarium destiné à l’éveil musical des enfants et se passionne pour les vertus curatives de la musique, en soutenant des programmes de recherche en musicothérapie. Il sponsorise par ailleurs les animateurs de « drum circles », qui font de la pratique du tambour un medium de recherche du bien être et de l’accomplissement de soi. Remo Belli utilise le terme « Remolution » pour décrire l’entrée de cet instrument originel qu’est le tambour – revu et corrigé par ses soins – dans une sorte de nouvel âge où la pratique de la percussion s‘apparente à un art de vivre. Remo Belli, grâce à sa vision, a réussi dans le music business, mais a su rester un batteur… et un rêveur. •